† Chapitre 1 -- All Around the Veil †

Admin

-- 3 janvier 2020 --

Il faisait froid en ce timide matin d'hiver. Il était neuf heures à peine, en ce lundi de reprise, le soleil était encore bas sur l'horizon, mais les rues de la Nouvelle-Orléans fourmillaient de vie. Le climat, inhabituellement rigoureux depuis une semaine pour une ville portuaire du Sud, avait nappé les rues d'une fine couche de neige qui se renouvelait chaque nuit. Émerveillés, sur le chemin de l'école, des enfants aux yeux enchantés couraient sur les trottoirs, échangeaient quelques projectiles, organisant d'épiques batailles de boules de neige et poussant des exclamations ravies à la vue de leurs traces de pas sur l'immaculée étendue. Des exclamations plus rageuses et contrariées émanaient des adultes qui progressaient en dérapant sur la chaussée, dans leur voiture ou sur leurs pieds, tâchant de rejoindre leur lieu de travail sans percuter d'autre véhicule ou obstacle inamovible et contondant, comme par exemple panneau de circulation ou lampadaire, voire gamin surexcité ou mamie partant en courses d'une allure de tortue.

Quelques véhicules faisaient exception à la règle : toutes sirènes hurlantes, une dizaine de voitures de police fonçaient sur la chaussée sans se préoccuper ni du verglas ni de la neige, toutes se dirigeant dans la même direction. On s'écartait sur leur passage. Il se passait sûrement quelque chose de grave... Les sirènes résonnaient dans le quartier, et une bouffée d'espoir naquit dans l'esprit des réfugiés de Through the Veil, boutique de voyance réputée. Sa propriétaire, Allanis Gilbert, avait eu la surprise d'y voir débarquer Catleen Pearl, Liberty Ketteridge, Wendy Mattew, Mark Galloway et Carlisle Jayden, tenus en joue par un homme visiblement menaçant et déterminé, qui venait apparemment de braquer la banque voisine, et se réfugiait dans la boutique avec ses otages, la sortie du quartier étant bloquée par les forces de l'ordre.

Allanis avait silencieusement usé de son lien surnaturel avec Eirinn MacAnrai pour la rappeler près d'elle, au cas où un vœu serait nécessaire pour se tirer de ce guêpier. L'Esprit de la Pierre était donc maintenant retenu en otage elle aussi, avec les autres, et leur vie servait de monnaie d'échange à un forcené au-delà de tout raisonnement. Une tentative d'évasion semblait risquée, et parmi les cinq autres personnes présentes, Allanis savait ne pas pouvoir compter sur Wendy pour faire un vœu. Saurait-elle convaincre discrètement une des autres femmes ou l'un des hommes, ou la situation serait-elle résolue avant de devoir en arriver là ? Pour le moment, ils étaient là, assis par terre, les femmes d'un côté et les hommes de l'autre, et ils attendaient...

[Ordre de postage -- Crystal Stone -> Carlisle Jayden -> Allanis Gilbert -> Lily-Rose Marshall -> Liberty G. Ketteridge -> Eirinn MacAnrai -> Wendy Mattew -> Catleen Pearl -> Mark Galloway]

Petit dernier du quartier

"Je suis définitivement maudit."
C'était, à peu de choses près, ce que Carlisle se répéta pour une vingt-sixième fois lorsqu'un homme particulièrement belliqueux le balança contre le sol poussiéreux d'une boutique sombre. N'ayant pas eu le temps de voir le nom de cette dernière, il jura contre lui-même en jetant un coup d'œil furtif au forcené qui l'avait pris en otage, lui et quelques étrangers qui étaient au mauvais endroit au mauvais moment. Dire que tout avait plutôt bien commencé. Carlisle était de ces adultes qui avaient suffisamment conservé de leur âme d'enfant pour s'extasier avec stupidité devant les flocons de neige qui tombaient encore par intermittence lorsque son réveil avait sonné le glas de son sommeil, aux alentours de six heures du matin. Exceptionnellement, et ce malgré la couche de neige qui risquait de causer des accidents, il privilégia le bus au métro pour se rendre au Palais de Justice. Il n'eut pas à attendre très longtemps, une petite heure qu'il perdit entre un café et un dossier aux invraisemblances effarantes, avant de recevoir un coup de fil de la criminelle. Un bout de papier, un crayon à papier, et il nota l'adresse en vitesse avant d'enfiler son manteau et de redescendre dans la rue, armé de son sens de l'orientation. Autant dire qu'à partir de cet instant, c'était déjà mal barré.

Perdu dans un quartier qu'il ne connaissait pas, Carlisle songea sérieusement à s'acheter un GPS portatif avant de porter son regard sur le bâtiment imposant d'une banque, éludant inconsciemment les éléments aux alentours (rétrospectivement, il se maudit de ne pas avoir porté plus d'attention sur les boutiques ; au moins aurait-il pu apercevoir dans quel fatras ce dément les avait embarqués). L'idée lui semblant fructueuse, il entra dans le bâtiment dans l'espoir sensé de demander sa route ; après tout, même s'ils ignoraient tout de sa destination, ils possédaient une connexion internet capable de le renseigner. C'était toujours beaucoup plus attirant que de se refaire une demi-heure de bus en sens inverse, quoiqu'il en soit. Quelques pas encore, et Carlisle s'immobilisa pour regarder les panonceaux. À cette heure-ci, curieusement, la banque était encore relativement déserte, aussi soupira-t-il de soulagement en se disant que, pour une fois, la chance lui souriait. Il n'aurait pas à patienter trop longtemps pour un simple renseignement. C'est là que le type avait sorti son flingue et s'était mis à gueuler que personne ne devait bouger s'ils ne voulaient pas crever. Puis, tout se passa très vite. La remise de l'argent, l'employée qui donnait l'alerte, le coup de feu, la prise d'otage, l'évacuation.

Tapi dans un coin de l'arrière-boutique, assis aux côtés du seul autre représentant du sexe fort, les mains derrière la tête, Carlisle tentait vainement de se concentrer sur autre chose que l'inquiétude palpable qui étreignait la pièce et par-là même ses occupants. Son regard dévisageait toutes les autres personnes et, mal à l'aise, il ne cessait de remuer en tentant de rester discret, assez peu tenté par la perspective de se prendre une balle en pleine tête. Sa vessie le tiraillait déraisonnablement, comme si, par instinct de survie, elle tentait d'attirer son attention pour lui faire oublier la peur qui lui bousillait l'estomac. L'idée sotte et grenue de demander où était les toilettes lui effleura les lèvres, mais déjà il baissait les yeux alors que leur bourreau grommelait à voix basse, maudissant certainement les officiers de police qui s'obstinaient à faire rugir leurs sirènes et qui, par analogie, faisait davantage paniquer le procureur. Il était bien placé pour savoir que la pression énervait les preneurs d'otages, a fortiori lorsqu'ils n'avaient plus toute leur tête. Et celui-là avait l'air d'en tenir une couche. Relevant les yeux pour tourner la tête vers les femmes, il adressa un sourire maladroit à l'une d'elle en croisant son regard, pas véritablement convaincu de sa propre performance néanmoins.

Quelque part sur sa hanche gauche, dissimulé par la veste de son costume, son holster sonnait comme un plan de survie en cas de dégénérescence. Et plus que tout autre chose, cette perspective asséchait la bouche de Carlisle et le faisait espérer que quelqu'un trouve une solution à cet enfer, vite et sans encombres.

Invité

FLASH BACK

D’un geste agile, elle fit glisser les tarots. La rouquine ferma les yeux et se mit à tirer trois cartes. Elle n’avait jamais eut un véritable don pour la voyance, mais sa mère si. Et ce jeu lui avait appartenu, ce jeu possédait de véritables pouvoirs, lorsqu’elle l’utilisait ses prédictions se réalisaient réellement. Malheureusement. Les trois cartes qu’elle venait de tirer annonçaient un avenir obscure et dangereux. C’était étrange, l’avenir était brouillé, il ne voulait pas se révéler à elle. Elle tira une quatrième quatre pour plus d’éclaircissement. Ses yeux s’agrandirent d’horreur en voyant la faucheuse. La mort rodait toujours dans son entourage, mais cette désagréable impression ,qui accompagnait cette carte, ne lui plaisait pas. Elle avait l’impression qu’elle était directement visée. Machinalement, son regard se tourna vers le tapis qui recouvrait la tâche de sang qui était apparue la nuit où elle avait égorgé sa chère grande sœur. La voulait-elle donc à ses côtés au royaume des morts ? Oh, si elle y arrivait, elle s’en mordrait les doigts, car elle n’était pas un cadeau dans le monde des vivants et ce n’est rien comparer à ce qu’elle sera capable une fois dans le monde des morts…

FIN DU FLASH BACK

Son regard noir et hautain trahissait son attitude d’apparence soumise. L’avenir dans les cartes avait tous les éléments réunis pour se réaliser. Elle changea le plus discrètement possible de position, en plus d’être plus confortable, elle avait maintenant une vision complète des personnes présentes dans la pièce. Il y avait cet imbécile qui avait l’air d'être capable de mettre une balle dans le premier qui ne fera pas ce qu’il voudra, deux hommes qu’elle avait déjà certainement vus de loin, peut-être même jusqu’à brièvement parlés sans qu’elle ait un véritable souvenir (pas véritablement intéressant dans ce cas), du côté du véritable sexe fort il y avait cet esprit qui, pour une fois, pourrait lui être directement utile, cette jeune fille qui avait retrouvé la vue grâce au souhait d’un garçon et qu’elle pouvait définitivement enlever de son plan et il y avait deux autres femmes qui avaient l’air plus en position pour réaliser ce qu’elle souhaitait. Elle fixa de son regard de braise l’esprit de la Crystal Stone, avec un peu de chance, elle avait compris la situation et son plan sans qu’un mot soit dit. A priori cela devait être clair, cependant avec cette petite idiote, on n’est jamais sûre de rien vous savez. C’est pour cela qu’elle avait besoin d’une confirmation, un petit signe de tête, un clignement d’œil, ou quelque chose du genre ! Néanmoins, elle ne se contentant pas de cela, le temps s’était de l’argent et là elle perdait son temps et donc son argent. Et elle détestait cela. Dés que le regard de ce petit cafard n’était pas posé sur elle, elle faisait des roulements d’yeux en direction des autres pour qu’Eirinne comprenne qu’il fallait qu’elle essai elle aussi de leur parler. Elle ne pouvait se permettre d’appuyer son plan que sur une seule personne. L’humain est égoïste de nature et si celle à qui elle confit son plan, du moins si elle y arrive, est comme elle. C’est-à-dire cupide et égoïste, cette personne refusera. Forcement. Du moins, elle s’y on lui proposerait elle refuserait sans hésiter une seule seconde.

Son regard survola l’ensemble de la pièce, à la recherche d’un autre élément qui pourrait l’aider à se sortir de ce pétrin, malheureusement, elle ne voyait strictement rien. Pas la moindre petite poupée vaudou. Il ne lui restait plus que son charme, mais oserait-elle à aller jusqu’à l’utiliser sur ce misérable ? Oh ce n’était pas qu’elle en doutait, s’était seulement que l’idée de l’utiliser sur un être si misérable l'a dégoûtée. Voyez-vous, ce n’était pas parce qu’elle était libertine, qu’elle s’abaissait à coucher avec le premier venu ! Non, elle s’en voyait incapable. Il n’y avait plus qu’à reposer sur la Crystal Stone. Cela lui aurait été plus utile si elle savait si les hommes connaissaient le pouvoir de la pierre ou non, mais ce n'était pas le cas malheureusement. Elle posa un regard perçant sur celui qui les retenait en otage et le gratifia d’un sourire malveillant.

Allanis - "Ah votre place, je ferais attention... Les esprits sont avec moi et réalisent tout ce que je souhaite."

Elle appuya sur les derniers mots, il n' y avait plus qu'à espérer qu'un des imbéciles coinçaient avec elle connaisse l'existence de la Crystal Stone et surtout comprenne là où elle voulait réellement en venir.

Admin

Que faisait donc Liberty ici ? Voilà qu‘un malfrat avait essayé de s‘emparer d‘une foule de personnes dans l‘espoir de pouvoir échapper à la police. Quelle idée aussi de braquer une banque pensant qu‘il ne se ferait pas repérer. Maintenant, la jeune femme se retrouvait avec d‘autres femmes et un seul homme. Pas de quoi leur sauver la vie quand on y pense. Seulement, elle se trouvait dans un lieu qu‘elle n‘avait jamais eu l‘occasion de visiter ou bien d‘y venir dans l‘espoir de venir faire parler les cartes ou demander qu‘on lui lise l‘avenir. De nature légèrement pessimiste, la jeune étudiante ne croyait pas un seul instant en tout cela. Mais voilà que l‘autre femme parle d‘esprits. Elle se retient de ne pas rire. Evidemment, elle connaissait l‘existence d‘une soit dire pierre mais encore une fois, elle ne voulait pas y croire, pensant que c‘est une histoire qui sert seulement à faire peur aux plus aveugles d‘entre nous. Alors la seule chose qu‘il lui restait à faire été de patienter jusqu‘à ce qu‘on vienne les sortir de ce pétrin.

Pendant ce temps, elle se contente de regarder le visage des autres. Elle ignore si beaucoup d‘entre eux le savent, mais posséder un pouvoir permet d‘aider pas mal. Le courage sur les visages des uns, la peur sur les autres. Ce voleur en question était complètement pétrifié à l‘idée de se faire prendre et dans un sens, elle savait qu‘il n‘hésiterait pas à ôter la vie de l‘un d‘entre eux si c‘était vraiment nécessaire. Cette simple idée la fait légèrement frissonner. Mais bon sang, qu‘est-ce qu‘elle faisait là ? Juste parce qu‘elle se trouvait à proximité et que par malchance, il n‘avait pas eu d‘autres choix que de la prendre à partie. Une histoire bien simple quand on y pense mais qu‘est-ce qu‘elle aurait aimé être à la fac de jour-là pour ne pas se retrouver là, dans un endroit de fou avec un voleur fou. Liberty bouillonne de l‘intérieur et chaque minute qui passe l‘énerve un peu plus. Se cachant le visage durant un instant, elle finit par se lever pour faire face à ce délinquant et le pointer du doigt. Si c‘est elle qui devait y passer pour sauver la vie des autres, elle n‘hésiterait pas un instant. La mort, on y passe tous un jour.

« Je vous conseillerais d‘arrêter tout ça. Vous empirez votre situation et je vous assure que je sais de quoi je parle. Vous avez peur ! Vous tremblez ! La simple idée que quelqu‘un puisse vous voir comme ça vous fout les pétoches ! Mais regardez un peu dans quel état vous êtes. »

Sa voix se faisait de plus en plus aigue et elle criait presque.

« Vous pensez à votre famille ?! Si elle vous voyait, si elle savait l‘espace d‘un instant que vous faites ça … »

Se disant qu‘il faut maintenant arrêter, elle repart à sa place et fermant les yeux avec la peur permanent de se prendre une balle dans le dos. Heureusement, ça n‘arrive pas et le voleur semble légèrement sur les fesses. Il était temps pour lui de penser un peu à tout ce qu‘elle venait de lui dire. Etudiant en droit, il risquait gros.

Admin || Esprit de la Pierre

Encore une tuile qui lui tombait sur les épaules. Était-ce à cause d'Allanis ? Oui, au moins partiellement. Elle avait cru bon, sans doute, de rappeler à ses côtés l'Esprit de la Pierre, alors qu'Eirinn ne pouvait rien faire, dans de telles circonstances, soumise à la menace directe d'une arme. Et elle n'osait même pas imaginer ce que sa Gardienne allait bien pouvoir imaginer en contrepartie si l'un des autres otages acceptait de formuler un souhait. Il y aurait encore de la souffrance, de la peine, et des remords supplémentaires, pour elle. Encore du chagrin et des larmes, encore de la douleur et du désespoir. La Crystal Stone supposée apporter un rayon de lumière ne projetait plus que de l'ombre, désormais...

Elle avait scruté attentivement le visage de tous les présents. La même tension s'y lisait, avec des degrés variables d'intensité. Tous avaient apparemment été raflés dans la banque braquée, ou dans la rue, avant de s'entasser dans la petite boutique d'Allanis. Le forcené avait l'air tout aussi hagard, surtout après la tirade délivrée par une jeune femme qu'elle connaissait, Liberty Ketteridge - elles s'étaient percutées dans la rue quelques jours plus tôt.

Autour d'elle, deux hommes et plusieurs femmes, dont Wendy, qu'elle connaissait aussi, même si elle doutait que la jeune femme se souvienne d'elle... Wendy, la femme pour qui Chase avait sacrifié ses yeux. Une véritable tragédie qu'elle ne se pardonnerait jamais. Une pointe de haine envers sa Gardienne se manifesta : quel besoin avait-elle de manifester autant de cruauté ? De sadisme ? Pourquoi se réjouissait-elle tant de voir souffrir les autres ? C'était une des questions auxquelles Eirinn n'avait jamais su obtenir de réponse. Un mystère entier...

Le preneur d'otages avait dû réfléchir pendant ces quelques minutes de silence, car une nouvelle résolution animait son visage. Le front plissé, les sourcils froncés sous la détermination, il agita son arme en direction de Lily-Rose et Wendy. Il les laissait sortir... Les deux femmes ne demandèrent pas leur reste et se précipitèrent à l'extérieur. A côté d'Eirinn, Catleen soupira et changea de position. L'Esprit s'appuya en arrière contre le mur, et adressa un discret sourire à la jeune femme qu'elle avait rencontrée à Downtown peu de temps auparavant. Elle avait l'air un peu pâlotte, cette pauvre fille... Sans doute le stress. Ou la peur. Ou l'ennui, peut-être. Allez savoir, avec Catleen !

- Ca va, Catleen ? Reste calme.

Elle avait chuchoté, craignant que le fou armé ne décide de s'en prendre à l'un d'entre eux s'il était contrarié. Elle n'avait pas peur pour elle - il pouvait bien lui tirer dessus, elle n'en mourrait pas. Elle ne pouvait pas mourir. Mais elle avait peur pour les autres, pour les malheureux entassés dans la boutique et qui n'avaient rien demandé à personne. Elle avait peur qu'il ne s'en prenne à eux, peur qu'Allanis ne parvienne à en convaincre un de formuler un souhait, peur que tout cela se termine dans un bain de sang ou dans un torrent de larmes. Un bref regard autour d'elle - l'un des deux hommes, blafard, prenait visiblement sur lui pour ne pas craquer et se mettre à hurler. Il croisa brièvement son regard et lui adressa un sourire mal assuré, tentant malgré tout de se montrer rassurant - elle lui dédia un sourire chaleureux en retour. Il y avait sur sa hanche gauche un renflement suspect qui pourrait bien indiquer la présence de quelque chose de caché - téléphone, radio, arme ? Ne souhaitant pas attirer l'attention sur lui, elle reporta le regard sur Catleen et lui sourit également.

Voisin timide

Petit dernier du quartier

Ce matin-là, Gally n'avait absolument pas prêté attention à la neige comme avait pu le faire Carlisle, ou tous les gosses entre trois et sept ans de la Nouvelle Orléans. Il se fichait totalement du côté poétique de la chose, trop occupé à grommeler contre le gel qui s'était saisi de son moteur et empêchait sa voiture de démarrer. Il aurait du se méfier. Quand une journée commence par une mauvaise nouvelle, il vaut mieux retourner se coucher pour ne pas en subir d'autres.. c'est le genre de conneries qui s'enchaînent en cascades. Et là, ça n'a pas loupé. Mark Galloway faisait environ deux fois par an le tour des banques de la ville pour demander de nouveaux prêts, toujours plus faramineux, qu'on lui accordait pratiquement toujours sans sourciller. Deux PUTAIN de fois par an. Pourquoi cela fallait-il que ça tombe sur le jour où un taré frustré et dangereux décidait de braquer très exactement la banque ou lui-même était entré quelques minutes plus tôt ? Il aurait put lui pardonner s'il s'était contenté de prendre le fric et de se barrer aussi sec, mais non, ce connard décida de prendre les clients en otage. Dont lui, en l'occurance. Mark n'aimait pas tellement être interrompu dans une de ses tentatives pour devenir riche, autant dire que ce braqueur n'avait aucune chance de rentrer dans ses bonnes grâces. Il était complètement hystérique et il pointa son flingue sur eux en les obligeant à gagner une boutique, un peu plus loin, alors que déjà les sirènes des voitures de police rugissaient au coin de la rue. Gally suivit le mouvement sans broncher, la sauvegarde de sa propre vie ayant toujours été une de ses priorités, sans compter que la perspective de se prendre une balle refroidissait considérablement sa verve naturelle et ses prédispositions au marchandage.

Quand le type leur ordonna de s'assoir à même le sol, Mark permit à son regard de faire un petit tour d'horizon rapide ; quatre femmes et un seul autre homme avaient pris part avec lui dans cette joyeuse équipée, ce qui n'était pas vraiment pour le rassurer. Plutôt machiste et lâche, il avait vaguement espéré que des types costauds et suicidaires auraient put prendre sa défense sans qu'il ait à risquer sa propre existence, au cas ou les choses tourneraient mal ; il allait devoir renoncer à cette idée. Le seul autre représentant masculin présent tremblait comme une feuille et semblait sur le point de se vomir dessus. Gally ne pouvait pas sincèrement prétendre qu'il était totalement rassuré, mais tout de même, un peu de tenue que diable. Lorsqu'il laissa son attention retomber sur la gent féminine, il haussa cette fois les sourcils de surprise en reconnaissant Catleen Pearl, là, assise au milieu des autres, l'air aussi perdue qu'eux. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien faire là ? Le monde était décidément trop petit. Cela dit, il fallait bien reconnaître que cette étrange situation amusait beaucoup Gally. Histoire de pas se foutre un peu plus les boules à la place, quoi.

Il ne savait évidemment pas à quoi pensait Catleen au même instant en le dévisageant – le fait qu'il allait faire preuve de ses dons d'embobineur pour les tirer tous de là, à la Superman – mais il fallait reconnaître pour son salut qu'elle le connaissait bien parce qu'effectivement, les neurones de l'homme carburaient à pleins tubes. Mark regrettait à cette seconde de ne pas avoir sacrifié quelques centaines de dollars pour prendre des cours de tir et enfin apprendre à se servir du Colt Commander qu'il gardait précieusement -et stupidement – caché chez lui.
En pleine réflexion, il observa un moment le braqueur, silencieusement comme la plupart de ses camarades d'infortune, à l'exception d'une jeune femme qui se mit à déblatérer des stupidités plus grosses qu'elles, à propos de la famille du type armés, et autres conneries du même tonneau. Mark leva les yeux au ciel. La panique provoque vraiment des réactions inconsidérées. Il ne voulait pas se retrouver avec du plomb entre les deux yeux, vision qui le répugnait au plus haut point, mais il doutait que parlementer soit la meilleure des solutions dans le cas présent. Il fallait parfois savoir jouer la carte du silence au profit de cette de la manipulation.

Tournant légèrement la tête vers le mec tremblotant, Mark le fixa jusqu'à ce que ce dernier croise son regard, pour donner un petit coup de tête en direction du renflement qui ornait sa hanche. Il avait un flingue, lui. Qu'il se démmerde, rock'n'roll.

Nouvel habitant

C’était la fête dans cette boutique. Tout le monde quasiment se regardait dans le blanc des yeux. Le preneur d’otages était tout sauf maitre de la situation. Cet idiot tremblait de tous ses membres. Visiblement, il n’avait pas prévu de plan B an cas d’échec. Un peu trop sur de lui… L’assurance pouvait être une qualité, mais trop la transformait en défaut. Nous étions tous coincés ici. Les sirènes de la police animaient la rue. Je n’aimais pas la police, je n’aimais pas qu’on fasse irruption avec une arme dans ma boutique. Je n’aimais pas que les simples humains se croient chez eux chez moi. Seule la petite blonde osait ouvertement la ramener. Au moins une courageuse dans ce groupe.

- Vous comptez rester ici longtemps ? Parce que ma journée est chargée. On vient de loin pour bénéficier de mes pouvoirs.
- Ta gueule ! On restera le temps qu’il faudra.
– J’ai beau avoir vu votre mort dans mes tarots, je vous préviens, vous payez la casse si les flics débarquent en force ici.

Avec son braquage raté, il était mal barré. Nous aussi, d’ailleurs. J’étais l’élue des morts, s’il en tuait un dans le lot, ca me servirait peut être à quelque chose… Enfin… Le « peut-être » était à mettre en majuscule. On ne pouvait être sure de rien. Debout, les bras croisés, j’en avais marre de rester à rien faire. A cette heure-ci, j’avais mieux à faire que d’attendre qu’un forcené daigne libérer ma boutique. J’avais un business, moi. Je gagnais ma vie, à peu près honnêtement… Je marchais jusqu’à Eirinn et la tirait par le bras hors du groupe d’un coup sec. L’agresseur fit une nouvelle tentative d’autorité, vite avortée.

- C’est ma femme de ménage. J’ai un commerce à tenir, moi !

Notre homme devenait nerveux. Au moins la petite blonde et moi on avait du mal à reconnaitre son autorité. C’était moi qui avait amené Eirinn ici pour pallier à un éventuel vœu alors mon histoire tenait la route. Je tenais toujours la jeune femme par le poignet et la serrait assez fort. Je la rapprochais de moi pour lui parler doucement.

- Fais quelque chose. On ne va pas laisser ce crétin démolir mon fond de commerce et découvrir ce que tu sais. Ou amènes-le à faire un vœu, mais sers à quelque chose au lieu de rester plantée là.

Je ne faisais pas grand cas de la vie de tout ceux présent ici, mais d’Eirinn encore moins. C’était mon esclave, elle devait m’obéir et répondre à mes exigences. J’étais la gardienne de la pierre, choisie par les druides. Je commandais à des forces qui dépassaient l’entendement. Mais la source de mes pouvoirs, c’était Eirinn. C’était elle l’esprit de la Pierre, l’intermédiaire entre ces forces et moi. Un jour, je trouverais comme m’en débarrasser, mais pour l’instant, je devais faire avec elle.